Poubelle

L’action se déroule à Ciudad Juárez, un nom tristement célèbre pour la violence qui y règne au quotidien, en particulier à l’encontre des femmes. La ville est située à la frontière entre le Mexique et les Etats Unis, voisine de El Paso au Texas.   

La décharge de Ciudad Juárez est le paysage urbain qui unit le destin des trois narratrices de ce roman fabuleux. Alicia, une jeune fille abandonnée qui vit des poubelles et qui rayonne comme un diamant oublié entre les déchets malgré toute la violence qu’elle a subie. Reyna, la gérante d’un bordel qui protège les femmes coûte que coûte dans un environnement hostile où l’impunité règne, et où elle-même a dû prendre des décisions drastiques pour pouvoir vivre pleinement son identité. Griselda, une chercheuse sur le terrain qui étudie la décharge pour comprendre comment la violence est une conséquence des lieux, et qui doit jongler dans sa vie personnelle avec la maladie cognitive de sa tante. Ces trois vies s’entremêlent dans une intrigue inattendue et très bien construite.

La poubelle de cette ville frontalière pourrait être la métaphore des limbes où les vies marginales errent sans fin, mais au lieu de cela, les personnages de ce roman transitent à la recherche de la lumière. Sylvia Aguilar Zéleny dignifie grâce à ce texte la vie des personnes qui habitent ces territoires invisibles. Son roman nous pose aussi la question de comment l’on en vient à construire des sociétés où une partie de la population vit des déchets de l’autre partie. «Poubelle» est un roman sensible, puissant et plein d’humanité.

[Elisa]