#Roman
Roman d'un personnage, roman vorace, porté par une langue prodigieuse !
Mathieu Belezi
Moi, le glorieux
Dans ce roman, "140kg de viande coloniale" s'accroche furieusement au souvenir d'une gloriole évanescente. Dans ce roman, Albert Vandel, un colon gargantuesque, aussi libidineux que menteur, se fait chantre de l'Algérie Française dont il s'est gavé joyeusement. Il s'accapare l'espace ("sa terre", "son magot"), le temps (il a 100 ans, puis 120, puis 133, durée de la présence française en Algérie), la narration et les personnages (dans un conte des Mille et Une Nuits inversé, où la servante à laquelle il s'adresse ne cesse de lui répondre, en un lancinant refrain, "Foutez moi la paix, monsieur Albert"). On ne sort pas indemne de la rencontre intense avec cet ogre qui devient, au fil de ses histoires, un risible Don Quichotte.
Ce texte furieux, reprise révisée au Tripode du récit Les Vieux Foux (Flammarion, 2011), s'accompagne du livre Le Temps des crocodiles, illustré par Kamel Khélif en de somptueux tableaux quasi monochromes, faits de sable, de sang et de tristesse, roman où le même Albert Vandel, plus jeune mais non moins enragé, tranche à tour de bras dans un pays qu'il entend "dresser". Quels romans !
[Florian]