Mémoires effondrées

Ce qui frappe, quand on ouvre ce livre, c’est le dessin. C’est un univers singulier fait de mélanges de techniques graphiques : dessins, photos, collages, lavis, petites sculptures. C’est beau et original.
Quand on découvre le texte, on ouvre une boîte de pandore, on opère une fouille archéologique dans les carnets intimes du narrateur. On est intrigué, on se questionne : mais qui parle ? qui raconte ? quand ? et puis, on se laisse glisser petit à petit de case en case, on suit ce cheminement intellectuel d’une noirceur évidente mais d’une justesse incroyable. C’est le constat d’un homme effrayé par la finitude des choses, le dérèglement de toute la mécanique terrestre, le rien qui va bientôt advenir, celui qui suivra l’effondrement… C’est un constat pessimiste, certes, mais terriblement réaliste. Des méditations sur l’inconstance de l’humain, l’inconsistance du monde et les erreurs répétées qui conduisent l’homme à sa perte.
Cependant, on est touché par la beauté du dessin, la poésie de certaines pages dans lesquelles règnent des associations d’idées originales, les analogies étonnantes provoquées par les photomontages, « les poèmes visuels ».
Belle découverte que cet album réalisé par Baya, un graphiste autodidacte qui a su créer un univers bien à lui, inventif et touchant. Un très joli cadeau pour les amoureux des romans graphiques !