Les mots nus

Ben. Son prénom d'une seule syllabe n'a pas besoin des habituels raccourcis.
Pas comme le collège Jean Moulin renommé le Moulin par les élèves. Ni comme le quartier de Seine-Saint-Denis où il grandit et que ses habitants appellent la Brousse (qui connaît Ernest Labrousse ?). C'est là que se déploie le récit de Ben, au milieu des années 1990. Celui d'un jeune garçon, bon élève, sans histoires, qui n'est jamais pris pour cible lorsque dans la cour de l'école « la Chasse aux Français » est lancée. À la maison, l'amour de sa mère neutralise en partie les violences de son père. La télé, toujours allumée, ponctue son quotidien. Chirac et Jospin s'affrontent, Sérillon commente et Belmondo, idole des écrans, parade.
Las de la grisaille environnante, Ben décide d'aller passer son bac de l'autre côté du périphérique, puis s'inscrit à la Sorbonne. D'autres amis, d'autres lectures, d'autres découvertes. Et surtout Oriane, la fille aux yeux couleur de nuit et au tout petit sourire, qui occupe ses pensées... Mais les années 2000 apportent leur lot de guerres et de violences dans le monde, qui viendront secouer l'histoire politique de la France.
À la Brousse, la mort de Zyed et Bouna en 2005 constitue la bavure de trop.
La révolte s'organise. Inédite. Ben retrouve les filles et les garçons de son quartier et, à la tête d'un collectif, sillonne les banlieues pour rédiger des cahiers de doléances. De gré ou de force, il compte les lire à l'Assemblée nationale et reprendre le contrôle de la parole.