Nos coups de c½ur

#Roman

Une nouvelle saga historique et familiale jubilatoire !

Le Grand Monde

Pierre LEMAITRE

Le Grand Monde

Ed. Calmann Lévy - janvier 2022
Prix : 22.90 ¤
9782702180815

 

Aïe, aïe, aïe… il y a un risque à ouvrir cet ouvrage. Cela nécessite quelques précautions : veiller à vous assurer que vous n’avez rien de très urgent à faire, que vous disposez d’une bonne plage horaire, que vous n’avez pas la garde des enfants, le repas à préparer ou les courses à assumer… sinon, vous risquez de décevoir votre entourage…

 

Voilà. C’est simple : Pierre Lemaître a encore frappé ! Le Grand Monde est un roman de presque 600 pages complètement addictif qui nous plonge dans les Trente Glorieuses, entre Beyrouth, Saigon et Paris. On retrouve avec plaisir une fresque familiale, une épopée romanesque historique comme celle de la trilogie des « Enfants du désastre », constituée par les romans Au-revoir là-haut, Couleurs de l’incendie et Miroir de nos peines. C’est délicieusement divertissant, très bien écrit, très documenté et toujours très efficace.

 

On y suit la famille Pelletier, famille bourgeoise installée au Liban et fière de sa savonnerie « Pelletier et fils » : Louis et Angèle, les parents, Jean, François, Etienne et Hélène, les quatre enfants qui quittent les uns après les autres Beyrouth, brisant le cœur de leur mère et mettant à mal l’entreprise paternelle qui comptait sur l’aîné pour en reprendre les rennes. C’est la base de l’histoire qui commence à Beyrouth en mars 1948 et qui s’achève à Paris en novembre 1948.

 

Comme à son habitude, l’auteur alterne les chapitres : on suit le départ d’Etienne pour Saigon, puis celui de François et de Jean pour Paris, bientôt rejoint par leur jeune soeur. Il ménage ainsi un suspense efficace. La tension monte d’un cran entre les différentes parties du livre (3 grandes parties et un épilogue).

 

L’écriture est toujours extrêmement fluide, les personnages très incarnés, leur caractère bien affirmé et tout à fait perceptible dans des dialogues efficaces. Lemaître maîtrise à la perfection l’art d’immiscer directement dans le récit, sans crier gare, les paroles ou les pensées des personnages, technique qui relie ainsi étroitement le personnage à la scène qu’il est en train de vivre. Le lecteur plonge ainsi à sa suite au cœur de l’action.

 

L’auteur évoque dans une longue « Dette de reconnaissance » à la fin de l’ouvrage les auteurs à qui il a fait des emprunts (auteurs de littérature, historiens, traducteurs…). Il est un auteur classique qu’il ne cite pas pourtant (auquel il a peut-être pensé…) mais à qui, selon moi, son roman fait écho, c’est Balzac. Il y a dans la trilogie des Enfants du désastre et, de façon encore plus prégnante, dans ce nouvel opus du Grand Monde, quelque chose de la Comédie humaine de l’inventeur du roman moderne. Ancré dans une histoire plus contemporaine évidemment, Le Grand Monde donne à lire la folie des hommes, le terrible du capitalisme, la toute-puissance de l’argent qui fait plier tous les idéaux. Pierre Lemaître met en scène, comme Balzac, le laid, le vulgaire. Et puis, les personnages du Grand Monde sont des archétypes comme le sont ceux de la Comédie humaine. Chaque intervention de Geneviève, par exemple, la terrible épouse de Jean, l’aîné de la fratrie, est un sketch. La manière qu’a Geneviève de se coucher et de se réveiller est une trouvaille géniale de l’auteur. C’est un personnage détestable mais tellement drôle, tellement petit, méchant, calculateur…

 

Bref, du grand Pierre Lemaître ! GENIAL !!!