La route

Magistrale mise en scène du silence, que seules quelques lignes de dialogues viennent troubler de leur vertigineuse profondeur, cette bande-dessinée est un chef-d’œuvre. Percutante. Tranchante. D'une noirceur sans faille, plus encore que le roman qu'elle adapte. Adaptation réussie ? Oui, indubitablement. Mais un uppercut de cette trempe dépasse le cadre de cet exercice : la maestria de Manu Larcenet emporte son album en d'autres sphères que le roman radical de McCarthy. Maestria de la mise en scène, du découpage : ses planches sont des gravures de Dürer. Maestria de la colorisation : une palette de gris habille la bande-dessinée, palette où quelques touches de jaune, de rouge, perdent leur espérance. Maestria dans le détail tout autant que dans l'absence : si subsistent encore des bulles, grammaire essentielle de la BD, on s'enfonce avec ce père et son fils dans un horizon en plein décharnement, où un coup de feu ne produit plus d'onomatopée. Un album qui fera date. Bouleversant.

[Florian]