Nos coups de c½ur

#Roman

L'histoire simple d'une vie heureuse au coeur d'un verger dans le Vermont.

La Pommeraie

Peter HELLER

La Pommeraie

Ed. Actes sud - mars 2025
Prix : 22.50 ¤
9782330203597

La Pommeraie est une très belle histoire et fait partie de ces textes dont l'ambiance vous imprègne longtemps. C'est avec un bonheur infini et un profond regret que je repense à cette lecture pleine de douceur, le regret de l'avoir déjà achevée, et le bonheur des émotions traversées. Il ne se passe pas grand chose dans ce roman, on est loin de l'aventure incroyable de La Rivière ou du Guide mais on retrouve ce talent inégalé de Peter Heller pour planter un décor, le faire vibrer, vous ouvrir tous les sens par le soin avec lequel il peint ses paysages et y fait évoluer ses personnages.

Ici, nous sommes aux côtés de Hayley et de sa fille Frith. Hayley est traductrice de poésie chinoise (et en particulier celle de la poétesse du VIIIème siècle Li Xue), a choisi de fuir le monde universitaire et a trouvé refuge dans une cabane au coeur d'une pommeraie redevenue sauvage dans le Vermont. Leur quotidien est simple, occupé par les travaux au verger, la fabrication du sirop d'érable qui leur permet de gagner de quoi vivre chichement mais correctement. C'est Frith adulte qui raconte l'histoire. Le récit entraîne donc le lecteur entre passé et présent. Hayley n'est plus, Ours (le chien) non plus, comme Rosie, leur voisine et amie. Frith est revenue s'installer dans ce lieu de son enfance où elle fut heureuse, où elle n'a jamais manqué de rien, et surtout pas d'amour.

Quand démarre l'histoire, Frith a ouvert un coffre en bois d'érable qui a servi de table de chevet pendant des années dans un coin de leur bibliothèque. Ce coffre renferme un dossier que Frith n'a jamais voulu relire. Mais elle vient d'apprendre qu'elle était enceinte. Et cette grossesse change tout. Elle ouvre donc ce dossier et lit les poèmes traduits par sa mère et à chaque poème elle replonge dans ses souvenirs. Elle repense avec nostalgie à cette période de son enfance où elle admirait sa mère, la trouvant courageuse, intelligente et belle, surtout quand le soir, du haut de leur lit mezzanine elle l'observait en cachette quand Hayley était penchée sur la table sur laquelle elle traduisait, chuchotant des morceaux à voix haute.

Tout est beau dans ce roman. Le regard de Frith adulte sur l'enfant qu'elle était. Celui qu'elle portait sur sa mère. Le menton de Hayley dans les cheveux de Frith quand elle l'entourait enfant entre ses jambes. Le thé bu par elles deux enroulées dans des couvertures brodées par la voisine, assises sur le granite au soleil devant la maison. Le soleil qui inonde la pommeraie. Les pétales des arbres qui enneigent le verger. La nature est omniprésente et toujours aussi sublimée par la plume délicate de l'auteur mais la civilisation n'est jamais très loin. Il y a des gens tout autour d'Hayley et Frith, des gens bienveillants qui les aident et veillent sur elle. Même les Raiders et les Hell Angels québécois avec leurs mines patibulaires sont finalement très humains et prêts à aider.

Le charme du livre réside aussi dans cette espèce de magie qui opère à chaque poème lu: le choix du poème interpelle toujours Frith car ils évoquent tous des situations tellement proches de celles que sa mère et elle ont vécues, qu'il lui semble qu'ils ont été écrits pour elles. Tout est beau, tout est juste. Les sentiments évoqués le sont avec tellement de finesse qu'il est impossible de ne pas se laisser emporter.

Si vous avez envie de vibrations, de nature, d'amour, de tendresse, de bonheur... lisez La Pommeraie!

[Laure]