Hors scène

Album après album, John McNaught, auteur britannique, professeur de lithographie et d’impression en relief, construit une œuvre d’une très grande justesse. Contemplatives, douces-amères, ses bandes dessinées mettent des mots et des images sur le temps qui passe, l’ennui, l’adolescence, la beauté des petits riens, le rythme de la nature, sur les souvenirs qui restent. Automne (ed. Dargaud, 2016) nous plongeait dans les vestiges d’une arrière-saison douce-amère, un mardi gras d’octobre. L’été à Kingdom Fields (ed. Dargaud, 2020) prouvait avec talent la sensibilité cinématographique de l’auteur, en sublimant l’ordinaire d’un séjour au camping. Deux exemplesde l’acuité et de l’élégance rare du travail de John McNaught, que Hors scène complète à merveille.

 En cette fin d’année de 5eme, David est un collégien comme les autres, entre amis, jeux-vidéo, foot et école. École où, inscrit au club de théâtre, il prépare un spectacle. Mais si sur scène il doit interpréter le très sage Aslan, lion créateur du monde de Narnia, en coulisses c’est tout un monde qui se joue, tout un basculement pour le jeune garçon qui se prépare à un autre rôle, celui de "grand". En dressant par touches infimes une chronique de la fin de l’innocence, McNaught dévoile un paysage intime en pleine mutation. La mise en scène est exemplaire : le canevas du gaufrier installe une fausse impression de calme, que des ruptures bienvenues troublent brusquement, illustrant à merveille les doutes du personnage principal. Les couleurs douces et le cadrage léché finissent d’installer l’histoire dans une mélancolie délicate. Une magnifique BD, dont la finesse et le minimalisme touchent au cœur !

[Florian]