#Roman Poche
La vie en dix rounds d’un boxeur tsigane qui a osé défier le régime nazi. Un roman poignant, nécessaire, à mettre entre toutes les mains.

Charles AUBERT
Danser encore
Charles Aubert, que l’on connaît surtout pour ses polars, s’aventure ici sur un tout autre terrain : celui du roman historique. Et c’est une réussite totale. Danser encore retrace avec force et sensibilité la vie de Johann Trollmann, boxeur né en 1907, de nationalité allemande et appartenant au peuple du vent : les Tsiganes - plus précisément - les sintis originaire de l'Inde.
Sur la couverture, une photo en noir et blanc de cet homme au regard droit, qui porte en lui tout un peuple et une époque. Il découvre la boxe à l’âge de huit ans. Ce sport devient vite une passion, un langage, une danse qui lui rappelle les mots de sa mère : "Nous, les Sintis, savons parler au vent".
Son nom de boxeur ? Rukeli, "l’arbre". Et comme un arbre, il tiendra debout, jusqu’au bout, face aux humiliations, aux coups du sort et à la brutalité du régime nazi. Sur le ring, il virevolte, insaisissable. Son style, rapide et élégant, déroute ses adversaires. Il gagne, il perd, il apprend. Il vise un seul objectif : devenir champion d’Allemagne et rendre fiers les siens.
"La boxe n'est peut-être qu'une tentative désespérée de se battre contre l'injustice et la mort"
Le roman est structuré comme un combat : dix rounds, dix moments-clés d’une vie trop courte, rythmés par l’Histoire avec un grand H. Au fil des pages, la montée du nazisme se fait sentir, étouffante. L’étau se resserre, la tension monte. On ne parle bientôt plus que de "race", les destins individuels s’effacent sous la pression des idéologies.
Et nous, lecteurs, assistons à ce combat comme si nous étions au bord du ring : haletants, émus, bouleversés. On tremble, on retient notre souffle. L’écriture est à la fois incisive et poétique, parfois vacillante, comme un funambule au-dessus du vide. Elle nous prend par surprise, nous touche en plein cœur.
Peu importe que vous connaissiez ou non l’univers de la boxe : Danser encore est bien plus qu’un roman sur un sport ou un athlète. C’est le portrait vibrant d’un homme debout, animé par la dignité, la liberté, la justice.
Merci à Charles Aubert de nous faire découvrir ce destin hors du commun, et de rendre hommage à ce champion oublié, avec une telle intensité.
[Annette]